Radioactivité et santé
L’essentiel : Radioactivité et santé
Radioactivité et santé : sans nous en rendre compte, nous sommes exposés quotidiennement à la radioactivité naturelle : les roches, l’eau, les plantes… Tout est (faiblement) radioactif. Cette exposition, bien que naturelle, peut avoir des conséquences pour notre santé.
Les risques sanitaires de la radioactivité sont liés à :
- des expositions accidentelles et massives : prenons pour exemple Tchernobyl et Fukushima ;
- une exposition au radon, un gaz naturel radioactif présent dans certaines régions françaises, qui peut favoriser l’apparition du cancer du poumon surtout si on est exposé sur de longues durées ;
- l’exposition médicale qui peut, dans certaines situations, exposer des patients à des doses non négligeables de rayonnements. Le bénéfice apporté par ces expositions reste toutefois très largement supérieur à leurs effets possibles.
La radioactivité est un phénomène naturel découvert en 1896 grâce aux travaux du physicien français Henri Becquerel.
Elle est liée à l’instabilité des noyaux atomiques de certains matériaux : ils vont spontanément se transformer en d’autres matières, en libérant au passage des rayonnements.
L’homme a ensuite inventé des procédés pour reproduire ces transformations et inventer de nouveaux éléments radioactifs pour des usages industriels ou médicaux.
Qu’est-ce que la radioactivité ?
Dans la nature, les noyaux d’atomes qui composent la matière sont stables pour leur grande majorité. Mais certains sont dits instables, car ils sont composés d’un nombre de protons et/ou de neutrons trop important. Ces noyaux radioactifs, appelés radio-isotopes ou radionucléides, se transforment spontanément en d’autres noyaux d’atomes, eux-mêmes radioactifs ou non.
Cette transformation se nomme la désintégration et elle s’accompagne de l’émission de rayonnements de plusieurs natures : rayons alpha, bêta moins, bêta plus (seulement pour certains radio-isotopes artificiels) et gamma.
Le pouvoir de pénétration des rayonnements est variable :
- de quelques centimètres d’air pour les rayonnements alpha (ils peuvent être stoppés par une feuille de papier),
- à plusieurs dizaines de centimètres de plomb ou plusieurs mètres de béton pour les rayons gamma.
Par exemple, le carbone a pour isotopes le carbone 12 (qui possède 6 neutrons) et le carbone 14 (qui possède 8 neutrons). Alors que le carbone 12 est stable, le carbone 14 est radioactif.
L’homme a inventé des procédés qui lui permettent de créer des éléments radioactifs qui n’existent pas à l’état naturel.
Quelles sont les sources de radioactivité ?
La radioactivité naturelle
Quand la Terre s’est formée, elle était composée d’éléments stables et instables. Depuis 5 milliards d’années, beaucoup d’éléments instables se sont désintégrés par radioactivité pour disparaître ou devenir stables, mais il en reste encore.
À l’état naturel on trouve :
- les radio-isotopes dont la période (ou demi-vie) est très longue : ils n’ont pas encore eu le temps de se désintégrer totalement ou de se transformer en matières stables. C’est le cas de l’uranium 238 avec sa période de 4,5 milliards d’années ;
- les radio-isotopes créés par la transformation d’autres radio-isotopes : en se désintégrant, l’uranium 238 donne, après plusieurs désintégrations, naissance au radium 226, qui se transforme lui-même en radon 222, un gaz radioactif ;
- les radio-isotopes créés par l’exposition aux rayons cosmiques : le carbone 14, le tritium ou le béryllium 7 sont ainsi créés en permanence dans l’atmosphère.
Au quotidien, nous vivons donc dans un environnement radioactif : nous respirons, nous mangeons, nous buvons des éléments radioactifs.
À titre d’exemples, on peut évaluer l’activité radioactive :
- d’un kilo de granite : à 1000 becquerels,
- d’un litre de lait : de 50 à 80 becquerels,
- et d’un être humain : à environ 8000 becquerels.
La radioactivité artificielle
L’homme produit des radio-isotopes artificiels grâce à des accélérateurs de particules ou des réacteurs nucléaires. Il s’en sert pour des usages industriels ou médicaux : radiographies gamma (ou gammagraphies) pour détecter les défauts à l’intérieur d’une pièce métallurgique par exemple.
Certains radio-isotopes produits dans les réacteurs nucléaires ne sont pas exploitables : il s’agit des déchets nucléaires. Ils sont fortement radioactifs et doivent être isolés de l’homme dans des lieux de stockage spécifiques.
Comment mesure-t-on la radioactivité ?
Le becquerel (Bq) : pour mesurer l’activité radioactive
Le becquerel mesure le nombre de désintégrations de noyaux radioactifs par seconde dans un élément : 1 Bq = 1 désintégration par seconde. Il représente donc l’activité radioactive d’un élément. Selon les éléments, les désintégrations des noyaux sont plus ou moins nombreuses et rapides.
Au bout d’un certain temps, l’élément aura perdu la moitié de son activité : on appelle cette durée la période ou demi-vie de l’élément.
Une période peut ne durer qu’une fraction de seconde ou au contraire s’étaler sur plusieurs milliards d’années. Après deux périodes, l’activité radioactive d’un élément n’est plus que de 25 %. Après 10 périodes, il ne restera qu’environ un millième de l’activité radioactive initiale.
Grâce au becquerel, il est donc possible de calculer la durée de vie d’un élément radioactif.
Exemples de périodes d’éléments radioactifs :
- carbone 14 : 5730 ans,
- cobalt 60 : 5,27 ans,
- iode 123 : 13,2 heures,
- uranium 235 : 704 millions d’années,
- Thorium 232 : 14 milliards d’années
- etc.
Le gray (Gy) : pour mesurer la dose absorbée
Le gray mesure la quantité de rayonnements absorbés par un organisme ou par un objet exposé à une source radioactive. Il traduit donc la dose de rayonnements absorbée.
Le sievert (Sv) : pour mesurer les effets biologiques
Le sievert mesure les effets biologiques des rayonnements sur un organisme exposé à une source radioactive. On parle aussi d’équivalent dose, car cette mesure tient compte de la nature du rayonnement reçu.
Quels sont les effets de la radioactivité sur la santé ?
Intensité et durée de l’exposition
On distingue en général :
- les expositions brusques, courtes et intensives : il s’agit d’expositions accidentelles, le plus souvent à des doses massives de rayonnements. Les effets sont immédiats ou répercutés sur les jours, semaines et mois qui suivent ;
- et les expositions à des doses faibles, mais sur de longues durées (plusieurs années) : c’est le cas de l’exposition à la radioactivité naturelle, dont on sait aujourd’hui qu’elle peut avoir des effets sur la santé (son niveau varie de façon importante d’une région à l’autre).
Irradiation ou contamination ?
- Contamination externe : les substances radioactives sont déposées à la surface du corps.
- Irradiation externe : les sources émettrices de rayonnements sont situées à l’extérieur de l’organisme, mais les rayonnements l’atteignent.
- Irradiation interne : les substances radioactives ont été inhalées, ingérées ou sont passées à travers la peau dans le cas d’une blessure par exemple. Elles ont pénétré à l’intérieur de l’organisme.
Quels sont les effets de la radioactivité sur l’organisme ?
Pour les doses importantes, on parle d’effets à seuil : ils varient selon les doses de rayonnements radioactifs reçus, l’importance de la zone irradiée et sa localisation.
On peut identifier les effets suivants :
- apparition de lésions et brûlures,
- chutes des ongles et cheveux,
- diarrhées et vomissements,
- mort ou mutation des cellules, modification de leur fonctionnement,
- destruction des cellules sanguines et des défenses de l’organisme, le rendant plus sensible aux infections,
- stérilité temporaire ou définitive chez l’homme et la femme,
- atteintes plus ou moins graves de la peau : rougeurs, cloques ou nécrose,
- atteintes oculaires et dommages au cristallin de l’œil : favorise l’apparition de la cataracte,
- sur l’embryon ou le fœtus : risques de malformations, retards mentaux, troubles de la croissance.
Il existe aussi des effets aléatoires : ils ne sont pas systématiques, mais leur fréquence d’apparition augmente avec l’importance de l’irradiation.
Il s’agit essentiellement :
- de cancers (thyroïde, sein, lymphome, leucémies par exemple) et ils apparaissent après un certain temps de latence (jusqu’à plus de 40 ans) ;
- d’effets génétiques : les cellules reproductrices sont lésées par l’irradiation, et les caractères génétiques transmis à la descendance sont modifiés, se traduisant par des malformations et des anomalies qui peuvent s’exprimer après plusieurs générations.
Les usages médicaux de la radioactivité
Certaines molécules ont des formes instables, c’est-à-dire radioactives, qui conservent les mêmes propriétés chimiques que leurs formes stables. On les utilise pour suivre à la trace le déplacement d’un élément chimique dans le corps humain, par exemple pour vérifier la bonne assimilation d’un médicament par l’organisme, grâce à des appareils de détection et de visualisation très sensibles.
Ces traceurs radioactifs peuvent aussi être utilisés pour comprendre ou vérifier le fonctionnement d’un organe, comme le cœur et le cerveau (scintigraphie), ou pour détecter des tumeurs, car certains d’entre eux ont la propriété de se « fixer » sur des tissus malades.
Les traceurs radioactifs sont très faiblement radioactifs et sont utilisés en très petites quantités.
De ce fait, les risques qu’ils peuvent occasionner sur la santé sont très réduits. Leur période ou demi-vie est très courte : de quelques secondes à quelques jours au maximum. Ils disparaissent donc très rapidement du corps.
Lors de certains examens ou traitements, les doses administrées peuvent être plus importantes. Ainsi, durant les premières heures ou les premiers jours après certaines administrations, des recommandations peuvent être émises par les professionnels de santé et doivent être respectées : éviter durant quelques heures à quelques jours la proximité des jeunes enfants ou des femmes enceintes par exemple.
Au-delà des précautions d’usage que nécessite l’utilisation de ces produits radioactifs, il ne faut pas perdre de vue les formidables progrès qu’ils ont permis de réaliser tant dans le diagnostic que dans le traitement de nombreuses maladies.
Comment peut-on se protéger de la radioactivité ?
Les expositions brusques, courtes et intensives
En cas d’accident ou d’explosion nucléaire, les dangers sont le souffle de l’explosion (si on se trouve à proximité immédiate de l’explosion), la chaleur et les rayonnements émis pendant l’explosion, puis par les poussières radioactives qui envahissent l’atmosphère et retombent ensuite au sol.
L’exposition à des rayonnements radioactifs dont la source est extérieure à l’organisme est appelée irradiation.
Précisons toutefois que même en cas de très grave accident nucléaire (type Tchernobyl ou Fukushima), une centrale nucléaire ne peut pas produire une explosion similaire à celle d’une bombe atomique.
Les rayonnements radioactifs détruisent ou modifient les liaisons moléculaires des tissus de l’organisme. Les cellules meurent, subissent des transformations (mutations) ou deviennent incapables de se réparer.
Selon leur emplacement et leur nature, les tissus du corps humain sont plus ou moins sensibles aux radiations. Les enfants sont, de même, beaucoup plus sensibles à la radioactivité.
Les dégâts subis par le corps humain apparaissent sous forme de lésions et brûlures, les organes ne fonctionnent plus normalement.
Il n’existe que deux façons de se protéger dans un tel cas de figure :
- être situé suffisamment loin de la source ou dans un abri nucléaire pour ne pas être exposé à une trop forte quantité de rayonnements radioactifs,
- et avaler des comprimés d’iode stable pour saturer la thyroïde et l’empêcher d’absorber les iodes radioactifs émis lors de l’explosion comme le ferait une éponge avec de l’eau. Les comprimés d’iode stable sont distribués de manière préventive aux populations résidant à proximité des installations nucléaires. C’est le préfet du département qui informera du moment opportun pour prendre les comprimés d’iode le cas échéant. Hors de la zone considérée, et même si des stocks sont disponibles pour les populations, on peut raisonnablement douter de l’efficacité de la distribution qui devrait alors avoir lieu dans de telles circonstances.
En savoir plus sur les accidents nucléaires et leurs risques sanitaires : ministère des Affaires Sociales et de la Santé
L’exposition à la radioactivité naturelle et au radon
La radioactivité naturelle peut constituer un risque pour l’homme. Elle varie d’une région à l’autre, selon la nature des sols par exemple.
Ainsi, dans certaines régions, des expositions à un gaz radioactif, le radon, sont possibles.
Il s’agit d’un gaz présent dans les sols granitiques et volcaniques : il provient de l’uranium naturel. Il est inodore et incolore. S’il s’accumule dans des locaux mal aérés, le radon peut favoriser l’apparition de cancers du poumon : 10 % des cancers pulmonaires seraient dus à ce gaz selon l’OMS.
En France, les principales régions concernées sont la Bretagne, le Massif central, les Vosges et la Corse.
Les principales mesures de prévention :
- empêcher le radon de pénétrer ou de s’accumuler dans les bâtiments : étanchéité des fondations, mise en légère sous-pression du sous-sol adjacent au bâtiment et mise en surpression le bâtiment lui-même, etc. ;
- diluer le radon présent dans l’air grâce à un système de ventilation.
Pour en savoir plus sur le radon : www.solidarites-sante.gouv.fr
Références : Radioactivité et santé
Sources
- Centre international de recherche sur le cancer (CIRC)
- Société Française de Médecine Nucléaire et d’imagerie moléculaire (SFMN)
- Autorité de Sureté Nucléaire (ASN)
- Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN)
- Ministère des Affaires Sociales et de la Santé
- Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité : CRII-RAD
Auteurices
- Philippe Perrin, éco-infirmier
- L’Equipe Offre Prévention de la Mutualité Française